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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Succès de librairie annoncé, le tout premier livre de Barack Obama est enfin disponible en français. Sous le titre Rêves de mon père (Dream From My Father), les éditions Presse de la cité vont offrire l’agréable autobiographie du jeune politicien, ambitieux et plein de bonne valeur, celui que sa maman faisait travailler assez tôt le matin certaines matières scolaires complémentaires pour lui assurer une bonne éducation… Mais le souvenir de son père, Barack lui-aussi, n’a jamais quitté le jeune Barack Obama. Il en fait étalage dans ce livre fascinant et amusant dont cet extrait porte sur un incident raciste raconté par son grand-père maternel. Cette thématique est assez évocatrice ce jour ou Barack Obama prend de nouveau ses distances avec les propos véhéments de son ancien pasteur, le révérend Jeremiah Wright, dont le langage ne correspond pas du tout au style et au message rassembleurs qui font la personnalité, l’élégance et la mixité raciale de ce phénomène politique… Et pourtant, des adversaires chercheront sans doute à lui coller ces propos qu’il a cru bon, lui-même, de revenir là-dessus, pour mieux s’en détacher. Pour le livre, en voici un extrait amusant, en attendant que son deuxième livre (The Audacity of Hope) ne soit aussi traduit en français. Dois-je le dire ? Le sermon fautif du retraité pasteur Jeremiah Wright s’intitulait aussi l’Audace de l’Espoir, The Audacity of Hope.




Carlo Portelli, La Charité de Saint Nicholas de Bari
Carlo Portelli, La Charité de Saint Nicholas de Bari
J'appris que mon père était africain, kényan, de la tribu des Luos, né sur les rives du lac Victoria dans une localité appelée Alego. Il gardait les chèvres de son père et fréquentait l'école construite par l'administration coloniale britannique, où il se révéla très doué. Il obtint une bourse pour aller étudier à Nairobi. C'est là que, à la veille de l'indépendance du Kenya, il fut sélectionné par des chefs kényans et des sponsors américains pour aller étudier dans une université américaine, rejoignant la première grande vague d'Africains envoyés à l'étranger pour y apprendre la technologie occidentale et la rapporter dans leur pays afin de forger une nouvelle Afrique moderne.
En 1959, à l'âge de vingt-trois ans, il arriva à l'université de Hawaii. C'était le premier étudiant africain accueilli dans cette institution. […] À un cours de russe, il rencontra une jeune Américaine timide, modeste, âgée seulement de dix-huit ans, et ils tombèrent amoureux. Les deux jeunes gens se marièrent et eurent un fils, auquel Barack transmit son prénom. Il obtint une nouvelle bourse, cette fois pour poursuivre son Ph.D., son doctorat, à Harvard, mais non les fonds nécessaires pour emmener sa nouvelle famille avec lui. Il y eut donc séparation, à la suite de laquelle il retourna en Afrique pour tenir sa promesse vis-à-vis du continent. Il laissa derrière lui sa femme et son enfant, mais le lien d'amour perdura malgré la distance… […]
Mon père ne ressemblait en rien aux gens qui m'entouraient, il était noir comme le goudron alors que ma mère était blanche comme le lait, mais cela me traversait à peine l'esprit.
De fait, je ne me souviens que d'une seule histoire traitant explicitement du problème racial. Cette histoire racontait qu'un soir, après avoir passé de longues heures à travailler, mon père avait rejoint mon grand-père et plusieurs autres amis dans un bar de Waikiki. L'ambiance était joyeuse, on mangeait et on buvait au son d'une guitare hawaïenne, lorsqu'un Blanc, à haute et intelligible voix, se plaignit tout à coup au propriétaire d'être obligé de boire du bon alcool «à côté d'un nègre». Le silence s'installa dans la salle et les gens se tournèrent vers mon père, en s'attendant à une bagarre. Mais mon père se leva, se dirigea vers l'homme, lui sourit et entreprit de lui administrer un sermon sur la folie de l'intolérance, sur la promesse du rêve américain et sur la déclaration universelle des droits de l'homme.
«Quand Barack s'est tu, le gars s'est senti tellement mal à l'aise qu'il lui a filé aussi sec un billet de cent dollars, racontait Gram'pa. Ça nous a payé toutes nos consommations pour le reste de la soirée… et le loyer de ton père jusqu'à la fin du mois

Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 18/03/2008 à 14:59
Tags : biographie espoir obama Notez