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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Démocratie populaire
Démocratie populaire
« Un électeur tout puissant au moment du scrutin, puis réduit au silence jusqu'au prochain appel aux urnes. Cette idée (…) a alimenté la discussion sur la fameuse démocratie participative. (…) Autant il faut permettre aux citoyens d'être actifs entre chaque élection, autant, il faut savoir que ces débats risquent de ne mobiliser que ceux qui veulent ou peuvent être particulièrement actifs. (…) La démocratie participative risque d'affaiblir encore plus les partis. (…) Si elle se substituait au travail des élus, elle nous ferait entrer un peu plus dans l'ère du populisme. »

Michel Wieviorka, Ouest-France



Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 07/12/2006 à 11:11




Commentaires

1.Posté par LEGRAND le 09/12/2006 17:52
Jurys populaires et démocratie participative
Il est important de clarifier le concept de "démocratie participative" car aujourd'hui on dit tout et son contraire à ce propos, c'est un peu l'auberge espagnole.


Première remarque, il ne devrait pas être nécessaire d'employer ce terme de "démocratie participative" car la démocratie est par essence participative. Il s'agit donc, du point de vue purement linguistique, d'un pléonasme.


Cependant sur le plan politique, ce concept répond à une nécessité profonde de changer le rapport des citoyens à la politique telle qu'ils la vivent aujourd'hui.


C'est bien parce que les citoyens sont la plupart du temps exclus des décisions politiques, ou qu'ils ne sont que rarement consultés sauf lors des élections, qu'il y a un sentiment général d'un manque démocratique, d'un défaut de démocratie.

En effet, dans cette société les gens sont davantage considérés comme des consommateurs que des citoyens. Et quand ils ne peuvent pas consommer, ils ne sont pas considérés du tout, ils n'ont presque pas de droits tout simplement parce qu'ils n'ont pas ou peu d'argent et/ou qu'ils n'ont pas d'emploi (droit à la santé, droit de se loger, droit de se déplacer, droit de travailler, droit de s'alimenter, droit de s'éduquer etc...autant de droits qui deviennent payants ou qui sont de plus en plus chers dans une société capitaliste). Sur les lieux du pouvoir ou du travail, les gens ne sont pas ou très peu consultés et quand ils le sont c'est extrêmement cadré et canalisé, seulement sur certains sujets qui ne sont pas choisis par les gens eux-mêmes mais par les dirigeants ou les décideurs.

Pour moi mais aussi pour beaucoup de gens de gauche la démocratie participative, c'est surtout l'action pour créer des moyens, voir des institutions qui permettent aux gens de maîtriser de A à Z un processus de décision, d'y être associés, d'y collaborer, voire de le créer.

Je suis contre les jurys populaires. Car cette conception signifie, qu'il y aurait d'un côté les élus et de l'autre les citoyens. Avec les jurys populaires, les élus seraient des spécialistes de la politique, ils entreprendraient à eux seuls la politique et les citoyens seraient là pour sanctionner seulement ! Ce serait aller encore plus dans le sens de la spécialisation de la politique par une minorité d'initiés, de sa professionnalisation alors qu'il faut qu'elle devienne une pratique sociale généralisée ouverte à tous les citoyens.


Mme Royal propose en fait de poursuivre ce qui existe déjà en donnant aux citoyens un rôle de sanction mais non de réelle participation. Un jury qui sanctionnerait serait encore plus restreint que ce qui existe déjà avec le suffrage universel. Le suffrage universel est la sanction républicaine du jury populaire qu'est le peuple à l'échelle de la nation. Mme Royal n'invente rien. Quant à la suggestion de filmer les débats on reste encore dans le spectacle, le citoyen n'étant pas acteur mais encore et toujours spectateur.

Il faut que les élus rendent compte de leur action tout au long de leur mandat , et pas seulement à son terme, et associent les citoyens au processus qui conduit les élus jusqu'à la décision par le vote de l'instance élue. Par exemple que font les maires pour que sur chaque dossier concernant leur ville les citoyens concernés puissent travailler ensemble et avec les élus pour élaborer la décision qui sera prise au conseil municipal. Même question pour les autres niveaux comme le département, la région, la nation, l'Europe.

Il s'agit donc de créer de nouvelles institutions qui permettent aux citoyens de participer pour aider les élus à prendre des décisions qui vont dans le sens de l'intérêt général. Il s'agit pour les responsables politiques d'accepter d'être remis en cause, de favoriser la rencontre et le travail des citoyens pour qu'un dossier puisse être enrichi de leurs apports. Bien des lois pourraient être plus justes et correspondre davantage à l'attente des gens si les députés dans chacune de leur circonscription invitaient les citoyens à élaborer les textes avec eux. Autrement dit la démocratie représentative doit être revivifiée par la démocratie participative. Ce qui donne encore plus de validité à la légitimité de la représentation du fait qu'elle se fonde alors non seulement sur le suffrage universel mais aussi sur une participation de plus en plus large et pluraliste des citoyens pouvant permettre ainsi de dépasser certaines oppositions non nécessairement antagoniques.

Mais pour cela il faut dégager des moyens financiers pour créer des institutions de base permettant aux citoyens d'intervenir, de participer aux réunions et de se former. Il faut qu'à l'entreprise, les chefs d'entreprises changent de culture et voient dans la citoyenneté des salariés un atout pour l'économie, un plus pour l'intelligence collective et pour l'entreprise elle même, une richesse par l'élévation du niveau de connaissances des travailleurs. Comme il faut aussi créer un véritable statut de l'élu qui permette aux élus qui travaillent, qui sont salariés, de se libérer pour participer aux réunions et pour se former également

Car il faut non seulement pouvoir avoir du temps pour aller aux réunions mais aussi il est nécessaire pour chaque citoyen de pouvoir se former à intervenir, à présenter ses propositions ou celles d'un collectif, à argumenter, à améliorer ses connaissances d'un sujet utile à la collectivité.

La démocratie c'est aussi éviter que ce soient les "beaux parleurs" qui dirigent toujours les débats mais que la parole des gens soit valorisée et prise en compte par des méthodes qui incitent au partage d'idées et à leur formulation par exemple par la pratique du compte-rendu. C'est aussi la pratique de l'évaluation des décisions publiques par la présentation par les élus des difficultés qui sont rencontrées afin de rechercher des solutions avec les citoyens concernés.

En fait c'est l'organisation, l'institutionnalisation d'un véritable partage des pouvoirs et des savoirs par le plus grand nombre et sans discrimination de quelque nature que ce soit soit qui fonde une véritable démocratie. Et c'est l'exigence incontournable de notre époque à tous les niveaux et dans toutes les sphères de la société.

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