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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Le leader libéral-démocrate, centriste, pourrait jouer le rôle de faiseur de roi après les élections législatives du 6 mai en cas de coalition. Il a convaincu 35% des téléspectateurs qui ont suivi le débat jeudi soir sur ITV et, cette fin de semaine, il est pratiquement en tête des plus grands gains dans tous les sondages politiques. C’est un bond extraordinaire pour celui dont la photo ne disait pas grand’ chose à la plupart des Anglais, il y a encore quelques jours. Le politicien nouveau genre parlant français, allemand et espagnol, va-t-il réussir à briser suffisamment le dualisme politique dans un pays de tradition? Il a tout l’air du Zoulou blanc, le Johnny anglais, que l’on n’attendait pas dans cette lutte au 10 Downing Street.


Nick Clegg en Johnny Clegg



Une partie de la Grande-Bretagne s’est découvert un nouvel homme politique jeudi soir. Nick Clegg, leader des libéraux-démocrates, a clairement remporté le premier débat télévisé électoral de l’histoire du pays. Alors qu’encore un tiers des Britanniques ne reconnaissaient pas sa photo jusqu’à présent, il s’est imposé face à près de 10 millions de téléspectateurs de la chaîne ITV, se montrant plus à l’aise que ses deux opposants.
Agé de tout juste 43 ans, Nick Clegg, qui a pris la tête des libéraux-démocrates (parti centriste) voilà plus de deux ans, a longtemps souffert d’un manque de reconnaissance du grand public. Mais entre les leaders conservateurs David Cameron et travailliste Gordon Brown, il avait jeudi soir le plus beau rôle: renvoyer dos à dos ses adversaires, qu’il appelle «ces deux-là».
Dans une Grande-Bretagne profondément déçue de ses hommes politiques, échaudée par le scandale des notes de frais l’année dernière, il a pu jouer le rôle de l’outsider. «Cette élection est une chance fantastique de faire les choses différemment. Ne les laissez pas vous dire que vous n’avez pas le choix.»
Si cette position de troisième homme n’est pas une surprise, son aisance pendant le débat est plus étonnante. Alors que le cadre du débat était très rigide (un spectateur pose une question, chaque candidat a 90 secondes pour répondre, puis une autre minute si nécessaire), il a été le premier à réussir à se détendre. Parlant directement aux spectateurs présents, il s’est montré plus concret que ses deux adversaires.
Cette victoire de Nick Clegg renforce son rôle potentiel de faiseur de roi de l’élection du 6 mai. En cas d’absence de majorité absolue des deux principaux partis, ce que les sondages prédisent, il pourrait aider à former une coalition. Les libéraux-démocrates ont 63 députés actuellement à la Chambre des communes (10% des députés), et ils devraient en compter le même nombre, si ce n’est plus. Pour l’instant, Nick Clegg refuse de s’exprimer sur une possible coalition, sauf à affirmer que le plus grand parti, quel qu’il soit, aura vocation à créer le gouvernement.
Nick Clegg a cependant fait le plus facile jeudi soir. Avec peu de couverture médiatique le reste du temps, il a bénéficié à plein de l’effet de surprise. Maintenant que les feux de la rampe sont tournés vers lui, il va devoir s’expliquer sur son programme qui possède des relents populistes : Il souhaite aussi une séparation complète des banques d’investissement et des banques de dépôts, une proposition qui sera difficile à mettre en œuvre sans accord international; les libéraux-démocrates veulent aussi renoncer au renouvellement du Trident, le système de sous-marins dotés de l’arsenal nucléaire britannique. Cela ne signifie pas la suppression complète de la dissuasion nucléaire, mais son affaiblissement.
Le côté proeuropéen de Nick Clegg peut aussi dissuader quelques électeurs britanniques. Sa mère est néerlandaise, sa femme espagnole, et il parle couramment français et allemand. Il a été député européen jusqu’en 2004.
Pour autant, le vent frais que fait souffler Nick Clegg pourrait être bien accueilli par l’électorat. De plus, l’une de ses cartes maîtresses est Vince Cable, son chancelier «fantôme», qui a pris un rôle très important pendant la crise. Ancien chef économiste de Shell, il est l’un des seuls à avoir averti des risques d’une crise avant l’explosion de la bulle financière. En cas de coalition, il pourrait devenir chancelier de l’Echiquier.
Crédités de 24% des voix selon le dernier sondage, les «lib-dems» pourraient dépasser leur score de 23% en 2005. Nick Clegg a même convaincu 35% des téléspectateurs qui ont suivi le débat, talonnant le leader tory David Cameron (36%) et loin devant Gordon Brown (24%). En cas de coalition, Nick Clegg imposerait à son partenaire une réforme du système électoral, pour le rendre plus proportionnel. Cela changerait à jamais la politique britannique, donnant aux «lib-dem» un poids proche de leur réel soutien populaire, avec presque le quart des votes.///////Eric Albert


Ad Valorem


Rédigé par psa le 19/04/2010 à 00:00