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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Le conservateur David Cameron, qui a formé avec le libéral-démocrate Nick Clegg, vice-premier ministre, son gouvernement, a tenu son premier conseil des ministres. Détendus, souriants, riant des blagues de l’autre, David Cameron et Nick Clegg ont entamé leur duo à la tête du Royaume-Uni. Désormais premier ministre et vice-premier ministre, les deux hommes, respectivement leader des conservateurs et des libéraux-démocrates, sont venus exposer leur entente dans les jardins de Downing Street, sous le soleil printanier, pour une première conférence de presse commune mercredi. Une première d'un exemple moderne récent...


Lorette Beaulieu Daoust, Le Grand Écart
Lorette Beaulieu Daoust, Le Grand Écart
«Cette coalition peut être un changement historique et un véritable tremblement de terre pour notre paysage électoral», estime David Cameron, le leader des conservateurs. Nick Clegg confirmait dans un même souffle: «Jusqu’à hier, nous étions des rivaux. Aujourd’hui, nous sommes collègues. C’est un nouveau gouvernement, mais aussi une nouvelle forme de gouvernement.»
L’accord entre les deux partis est certainement historique: il n’y a pas eu de coalition en Grande-Bretagne depuis la Seconde Guerre mondiale. Quand aux libéraux-démocrates, ils n’avaient pas été au pouvoir depuis les années 1920. D’un point de vue arithmétique, les deux partis s’offrent une majorité confortable: ils ont 363 sièges, soit 77 de plus que l’opposition. Concrètement, les libéraux-démocrates obtiennent cinq sièges au conseil des ministres. Ils auront aussi des secrétaires d’Etat dans chaque ministère. Nick Clegg devra cependant s’inventer un rôle. Son poste de vice-premier ministre ne comprend pas de portefeuille. Mais ce n’est certainement pas un titre honorifique. Il était présent au conseil des ministres jeudi, face à David Cameron. Quand ce dernier sera absent, il répondra à sa place aux questions au parlement. Les «lib-dem» disposent aussi de deux postes à l’économie, dont celui du puissant Ministère du commerce, qui revient à Vince Cable. Les principaux ministères reviennent cependant aux conservateurs.
La coalition entre ces deux partis autrefois ennemis peut-elle tenir? Les deux leaders en ont certainement l’intention. Leur évidente entente personnelle aide – ils ont tous les deux 43 ans et viennent de milieux sociaux similairement bourgeois.

Des désaccords

Pour autant, les désaccords potentiels sont nombreux. Entre l’aile gauche des «lib-dem» et l’aile droite des conservateurs, les différences idéologiques sont profondes. L’Union européenne en particulier pourrait être un grand sujet de désaccord. Les conservateurs ont refusé de transiger sur cette question, et ont mis William Hague, leader des eurosceptiques, en charge des Affaires étrangères. Les deux partis se disent cependant confiants sur la solidité de leur entente. «Ma belle famille indienne m’a appris que les mariages de raison marchent parfois mieux que ceux d’amour», s’amuse Vince Cable.
Pour consolider leurs liens, les libéraux-démocrates et les conservateurs ont publié un accord politique détaillé sur quatre pages, comprenant une série de mesures très précises. En particulier, ils imposent un mandat d’une durée fixe de cinq ans pour le parlement, afin que le premier ministre ne puisse plus décider à sa guise d’une dissolution. La date des prochaines élections est donc déjà fixée… au 7 mai 2015! «Avoir un gouvernement pendant cinq ans va nous permettre de prendre des décisions de long terme», estime David Cameron. Mais la vraie priorité concerne la réduction du déficit. La réforme bancaire et une grande réforme fiscale sont aussi en préparation. La suppression du projet d’une troisième piste d’atterrissage à Heathrow a aussi été décidée.
Un autre grand chantier est la réforme politique, dont Nick Clegg sera en charge. Outre la réforme de la Chambre des lords, qui deviendra élue, un référendum sera organisé sur l’introduction d’une dose de proportionnelle dans le mode de scrutin, l’une des principales revendications des «lib-dem», qui étaient désavantagés par le vote uninominal à un tour (le parti de Nick Clegg a obtenu 23% des voix, mais seulement 9% des sièges). Cette future consultation des Britanniques sera cependant un point de friction: les conservateurs, tout en acceptant la tenue du référendum, vont faire campagne contre. L’entente affichée par Nick Clegg et David Cameron pourrait alors faire face à de sérieuses difficultés.////// Eric Albert


William Hague
Ministre des Affaires étrangères, conservateur
Son sens de la répartie et son intelligence aiguë vont donner du fil à retordre au reste de l’Europe. Chef de file des eurosceptiques conservateurs, William Hague fait partie de la garde rapprochée de David Cameron, avec George Osborne. Entre 1997 et 2001, il était le leader des conservateurs, juste après qu’ils eurent quitté le pouvoir. Depuis, il a fait partie des «modernisateurs» du parti. A 49 ans, il devrait mener une politique étrangère typique de la droite britannique: atlantiste et eurosceptique.

George Osborne
Chancelier de l’Echiquier, conservateur
Ce proche de David Cameron, âgé de 38 ans seulement, a l’ingrate tâche de mener la réduction du déficit britannique, qui s’élève actuellement à 12% du PIB. C’est d’ailleurs lui qui a fait du déficit une priorité politique, s’inquiétant dès fin 2008 du trou budgétaire. Instinctivement très méfiant vis-à-vis de l’Etat, il est souvent considéré comme le maillon faible de l’équipe des conservateurs, étant accusé de dogmatisme libéral et d’arrogance par ses opposants. Son intelligence n’est cependant pas en question.

Vince Cable
Ministre du Commerce, libéral-démocrate
Vince Cable, 67 ans, succède à ce poste à la très influente figure des travaillistes, Peter Mandelson. Le «Monsieur Economie» des «lib-dem» est devenu très respecté depuis deux ans, ayant été l’un des seuls hommes politiques à avoir averti des dangers de la bulle financière avant la crise. Cet ancien du Labour (dans les années 1970), et ancien économiste de Shell (dans les années 1990) est l’un des hommes politiques les plus radicaux contre la City. Il propose de limiter les bonus payés en cash de quelques milliers de dollars.

Michael Gove
Ministre de l’Education, conservateur
Il est l’une des têtes pensantes des tories, sans doute une sorte de «gourou» pour David Cameron. Michael Gove, 42 ans, est derrière l’une des politiques phares des conservateurs: permettre aux parents de créer leur propre école, financée par l’Etat, si l’établissement local est de mauvais niveau. Adopté à l’âge de 4 mois, élevé par un père marchand de poisson et une mère laborantine, Michael Gove fait partie de cette branche des «conservateurs compatissants» mise en avant par David Cameron.




Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 14/05/2010 à 06:24