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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




C’est la prophétie du jour J, le plus long, où toutes les armes sont affutées pour la lutte finale qui commence avec la proclamation des résultats. Le ton est donné avec cette entrevue circonstancielle réalisée et juxtaposée par l’Express. Quelques heures avant le résultat officiel des élections présidentielles, LEXPRESS.fr a interrogé Pierre Mamboundou et André Mba Obame, deux des trois candidats gabonais qui revendiquent la victoire. Tout le monde retient son souffle, alors que la Liberté est captive et sous pression au nom de la sécurité...


Peur sur Libreville
Que se passe-t-il là où vous vous trouvez?
Pierre Mamboundou: Mon quartier-général est entouré par les bérets rouges (parachutistes) depuis 7H00 ce matin. Je suis de fait assigné à résidence, puisque je ne peux me déplacer. Les militaires contrôlent les allées et venues, empêchant même les taxis d'approcher.
André Mba Obame: Ici, aux abords de ma résidence, non loin de l'aéroport, les gens sont sereins. Ils savent qu'on a gagné. Du fait des rumeurs alarmistes et alarmantes qui circulent en ville, selon lesquelles on pourrait venir m'arrêter, voire attenter à ma vie, beaucoup sont venus faire barrage. Il y a dans les parages un déploiement de forces de l'ordre, mais qui n'a rien d'exagéré.
Est-il exact que vos partisans ont "mis à l'abri" les procès-verbaux de nombreux bureaux de vote?
Pierre Mamboundou: Oui. Des indices concordants nous incitent à penser que le pouvoir sortant a l'intention de s'emparer des PV afin de les trafiquer. Nos militants font en sorte de ne pas leur en laisser la possibilité.
André Mba Obame: C'est exact. La loi exige que les représentants des candidats obtiennent dans chaque bureau une copie du procès-verbal. Autant de documents que nous préservons, afin de déjouer toute tentative de corriger le verdict des urnes. Ce procédé a été employé au sein même de certains bureaux. Il fonctionne aussi au stade de la centralisation, avec la complicité de la Commission électorale. Il arrive même que l'on demande à nos délégués de signer un nouveau PV au siège de la Cénap! Notre vigilance complique donc la fraude. Ces stratagèmes rocambolesques peuvent malheureusement mettre le feu au pays.
Avez-vous pris contact avec l'autre opposant en lice?
Pierre Mamboundou: Je n'ai eu aucun contact avec André Mba Obame. Lequel donne des résultats fantaisistes. Lui aussi s'inscrit dans une logique de désordre. C'est inadmissible.
André Mba Obame: Ce n'est pas exclu, en tout cas pas à exclure. Le Gabon est un petit pays. Nous devons y préserver la paix. Ceux qui se parlent ne s'entretuent pas.
Avec-vous été approché par l'entourage d'Ali Bongo?
Pierre Mamboundou: Pas du tout.
André Mba Obame: A ce stade, aucun contact.
Avez-vous sollicité la présidente par intérim Francine Rogombé?
Pierre Mamboundou: Non. Je l'ai interpellée par voie de presse.
André Mba Obame: Non.
Quel est à vos yeux le scénario le plus probable pour les heures qui viennent?
Pierre Mamboundou: Le déploiement des Forces de défense et de sécurité trahit un projet de coup d'Etat électoral. Il s'agit d'empêcher le peuple de Libreville de se regrouper. Nous ferons tout pour que ce plan échoue.
André Mba Obame: Je ne suis pas Madame Soleil. Mais si l'on annonce demain des résultats non conformes à la vérité des urnes et qu'on nous sort des PV trafiqués, chacun peut déjà imaginer ce qui risque de se passer. Hier lundi, je me suis rendu au QG du candidat Zacharie Myboto. Avec plusieurs anciens prétendants, nous avons condamné ensemble la déclaration du candidat du PDG -Ali Bongo s'est dit lundi "largement gagnant", NDLR-, qui ressemble beaucoup à une tentative de coup d'Etat électoral.
Avez-vous conversé depuis le 30 août avec l'ambassadeur de France à Libreville, Jean-Didier Roisin?
Pierre Mamboundou: J'ai eu avec lui des contacts indirects. Je lui ai envoyé un émissaire afin de signifier mon inquiétude. En bon diplomate, il a enregistré et promis de rendre compte.
André Mba Obame: Non.


Silence


Rédigé par psa le 02/09/2009 à 01:22