Profil
Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Le Bain Turc de Dominique Ingres
Le Bain Turc de Dominique Ingres
La grenouille qui aime se faire aussi gros que le bœuf. Cette fable de La Fontaine, bien connue, est l’histoire du Canada que l’impudeur de ses politiciens veut toujours positionner à un niveau dont le pays ne possède pas les moyens. Il y a quelques jours, sans rire, le PM canadien Stephen Harper s’est fendu en un discours étonnant affirmant la suprématie de son pays sur les eaux nordiques de l’Artique, le pôle nord en d’autres termes.
Le Danemark s’en est étonné d’abord et hier, les Russes s’en sont allés, tout en bas, à quatre kilomètres de profondeur, planter symboliquement leur drapeau –en réalité un contenant de titane avec un drapeau à l’intérieur- pour affirmer leur autorité dans ces eaux qu’ils revendiquent, à leur tour, au moyen argumentaire d’une curieuse découverte scientifique le prolongement sous-marin d’une chaîne de montagnes russes polaires : la dorsale de Lomonosov. Un peu beaucoup tiré par les cheveux de la science, une telle découverte qui n’existerait que du côté de la Russie… Il va falloir produire les preuves à un moment donné à la communauté internationale.
Indépendamment des richesses potentiellement élevées que regorgerait cette partie du globe terrestre, il est complètement illusoire que Stephen Harper pense que, seulement pour des raisons de proximité, les uns –Russes et autres Européens, les autres –Américains particulièrement, laisseront le Canada devenir seul maître du pôle nord. Les petits Canadiens ont beau envoyer leurs demandes de cadeaux au Père Noël par le code postal H0 H0 H0 géré par Postes Canada, le vieux patriarche à la barbe blanche ne pourra pas livrer à temps, le pôle nord, son pétrole et son gaz, comme cadeau ultime à leur gouvernement.
Ces politiciens incrédules pensent gagner des voix en bombant leur poitrine devant leurs concitoyens par des déclarations irréalistes du genre : le Canada veut réaffirmer et exercer son autorité sur les eaux de l’Artique. À vue d’œil, et à vue d’œil seulement, le territoire canadien semble être le plus proche du fameux pôle nord, par rapport aux quatre autres pays que sont le Danemark, la Norvège, a Russie et les États Unis d’Amérique. Mais l’intérêt de la chose est tel que la logique seule ne résistera pas devant la géostratégie et les capacités dissuasives énormes que le Canada ne possède pas, sauf dans la tête de son PM Stephen Harper.
En fait, le Canada, un jour ou l’autre, doit se résoudre à avoir un profil diplomatique externe proche de celle de la Confédération helvétique et se cantonner dans un rôle de paix, au lieu de se prendre pour une puissance militaire qu’il n’est pas ; un fantasme politique qui draine les ressources du pays dans d’inutiles aventures militaires coûteuses qui ne flattent que l’orgueil de quelques esprits guerriers adeptes de rodéo. Il ne s’agit pas de renoncer au pôle nord ; Il s’agit bien d’user du réalisme dans cette aventure en travaillant sur l’établissement de règles internationales raisonnables pour la gestion de cette Route du nord qui pourrait devenir aussi rapidement qu’on le prévoyait, le canal de Panama du Nord. Il s’agit effectivement de cesser de faire croire aux Canadiens qu’ils auront la main-mise sur le pôle nord, parce que leur PM l’aurait décidé par un jour d’été chaud qui nous fait penser au célèbre Bain turc plutôt qu’à une future confrontation nordique.


Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 02/08/2007 à 15:33