Profil
Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




ARNAUD MONTEBOURG ECRIT A BERNARD KOUCHNER
Et tout cela nous fait penser au Salon des Refusés du temps de Manet


Olympia, Édouard Manet, 1863
Olympia, Édouard Manet, 1863
Mon cher Bernard,
Pour moi, tu es d'abord un ami, un homme de haute estime qui, dans tes actes, a contribué à changer la face de ce triste monde.
Pour nous tous, tu as inventé la théorie du droit d’ingérence d'abord médical et humanitaire, puis politique et judiciaire, cette ingérence qui fait céder la dictature devant l'impératif humain.
Tu n’étais pas un homme de parti ; tu te voulais en marge, un franc-tireur, c'est pour cela qu'au côté des Français nous t’aimions.
Tu fus un bon ministre de la santé dans le Gouvernement Jospin : droit des malades, équilibre de l'assurance maladie, et soutien aux hôpitaux de proximité. J'aimais ta manière d'aborder les problèmes et de les régler. Ton intransigeance te faisait avancer. Mais aujourd’hui, Bernard, tu le sais toi-même, la « rupture » de Nicolas Sarkozy dans laquelle tu as voulu jouer, te laissera sur le carreau, en loques, et seul au monde.
Car la politique étrangère de Sarkozy, c'est l'exact contraire de tes valeurs et de tes choix, puisqu'elle consiste non pas à restaurer la force de la parole de la France, mais au contraire, par narcissisme pulsionnel de son président, à se jeter aux pieds de tout ce que le monde compte de puissants, même condamnables. Sarkozy veut la photo avec tes ennemis historiques et moraux, et toi il ne te reste qu'à tenir la chandelle...
Le French Doctor en voyage officiel a Pékin, sous pilotage sarkozyste, n'a pas même un mot pour son ami le Dalaï Lama... As- tu oublié, Bernard, cette si belle leçon de diplomatie que ce toast assassin du Président Mitterrand au grand dîner d'apparat du Kremlin où il mentionna dans un silence de mort le nom de Sakharov ?
Les félicitations de l'Elysée à Poutine, auteur d'élections frauduleuses et probable commanditaire d'assassinats d'opposants, sont elles justifiées ? Ce ne sont pas des chapeaux -comme tu l'as si bien théorisé toi même- qu'il te faudra avaler, mais à ce rythme les Galeries Lafayette toutes entières.
L'épisode misérable et inquiétant de la visite de Khadafi à Paris a montré ce qu'est devenue cette brillante politique étrangère à laquelle tu prêtes désormais ton nom : la diplomatie française ridiculisée, le président contredit publiquement, la leçon de Khadafi à la France sur les droits de l'homme, les contrats inventés pour la plupart et envolés pour ceux qui restent… Beau succès !
Bien sûr, tu diras que ce ne sont pas tes décisions. Mais c'est là tout le problème, cher Bernard. Tu le sais mieux que d'autres, ce n'est pas toi le véritable Ministre des Affaires étrangères, mais l'omnipotent patron de la cellule diplomatique de l'Elysée, Jean-David Levitte qui fait nommer les ambassadeurs, construit les stratégies, représente le président et négocie dans ton dos. Toi tu es bon pour recevoir les ONG, pendant que les choses sérieuses se décident ailleurs... Tu es bon pour aller à la télévision ou à l'Assemblée nationale porter les lourdes valises de ce que tu désapprouves. Jusqu’à quand ?
Combien d'autres « heureux hasards », comme ce prétexte que tu imaginas pour t'échapper du piège Khadafi à Paris, faudra-t-il que tu inventes pour organiser ta défausse, habiller ta mauvaise conscience, et dissimuler ta gêne désormais publique ?
Jusqu'ou l'humiliation devra-t-elle faire entrer son mauvais parfum dans ta tête pour que tu réagisses enfin ?
Je fais partie de ceux qui ne peuvent pas croire que tu es homme à te laisser réduire par la cuisson du pouvoir à ce tout petit rôle de figurant, comme le montrent ces images répétitives de ton effacement.
La seule explication que je vois, c’est que tu as un accord politique avec ton
nouveau maître, le Président Sarkozy, pour te faire accepter ce que ton amour propre rend inacceptable.
La glissade atlantiste incontrôlée dans laquelle les sarkozystes emmènent la France a semble-t-il reçu ton soutien. Tu étais le seul homme à gauche à soutenir l'expédition américaine en Irak en 2003, quand Sarkozy était l'un des rares à droite à soutenir les funestes projets de l'Administration Bush. Le récent voyage du Président français aux Etats Unis fut remarquable, en ce que la France n'a pas dit un mot de désapprobation contre l'incroyable manipulation de l'opinion publique mondiale sur la prétendue détention par l'Irak d'armes de destruction massive.
Tes déclarations bellicistes sur l'affaire iranienne s'emboîtent parfaitement avec les desseins de la fraction la plus dure des Républicains américains, au moment même où les agences de renseignement américaines ont rendu un rapport (National Intelligence Estimate) invalidant, au point de les ridiculiser comme celles d'un vassal aveugle et empressé, les déclarations du Président français et de son Ministre des Affaires étrangères que tu es.
Ce ciment atlantiste qui t'unit à Sarkozy serait donc celui qui te maintient à flot dans cette pitoyable comédie, qui commence a Disneyland mais finit dans la tragédie d'une guerre incontrôlable, peut-être mondiale.
Si c'est ce sinistre dessein qui te fait composer ainsi jusqu'avec toi-même, je préfère te dire que tu ne t'en relèveras jamais. Les Français ne te le pardonneront pas. Nous non plus. Le mieux pour toi-même et pour la France serait que tu prépares ta sortie. Commence à réfléchir à ce que tu écrirais dans ta lettre de démission. Tu seras ainsi encore Bernard Kouchner, pour longtemps.
Bien affectueusement a toi. Arnaud Montebourg

(Publié dans Le Nouvel Observateur du 3 janvier 2008)



Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 02/01/2008 à 16:14



Dimitri Baranoff Rossine
Dimitri Baranoff Rossine
Parfois, je suis en retard. Ce n’est pourtant pas ma pratique dans la vie de tous les jours. En retard pour parcourir certains textes sur nos Sites Internet conventionnels. Je viens seulement de lire, juste à temps pour aborder l’année nouvelle autrement, le texte « Le Togo : l’utopie de la force » de notre ami Anani Alex Gomez. Évidemment, un texte à la togolaise, un texte au parfait reflet de l’éternel apprentissage de l’intellectualisme à la togolaise, c'est-à-dire contradictoire et confus à travers un alignement de mots et de rhétoriques aussi violents, désordonnés que creux et sans conclusion valable, s’il en existe.
Du début à la fin de cet exercice qui se voulait pourtant lumineux, il n’y avait pas la place à la Simplicité volontaire. Bien sûr, Pourquoi faire simple si on peut faire compliqué et paraitre savant en nommant, au passage, le grand sociologue de la rationalité Max Weber? Les occasions sont si rares...
C’est justement là, tout le mal de ces apprentis solutionneurs de la situation togolaise, vieux comme jeunes. Ils ont des yeux mais eux-aussi ne voient pas. Ils ont des oreilles mais ils n’entendent toujours point. Alors, nous n’avons pas grand-chose à attendre de leurs réflexions, puisque leurs analyses n’en forment toujours pas une de détachée, d’impartiale et d’achevée dans l’exploration des contours de la réalité togolaise faite de superpositions d’irrationalités et d’erreurs historiques partagées -et c’est un euphémisme délibérément choisi que ce terme erreur.
Encore une fois, il va falloir le répéter et ne pas s’en lasser : Au Togo, un seul autre mort politique est un mort de trop! Il faut accepter de changer de paradigme, se pardonner, apprendre à se faire confiance pour rebâtir un autre avenir d’où naîtront la Perfection politique, la Justice et la Démocratie. En somme, accepter le sacrifice de l’imperfection actuelle et travailler courageusement pour les générations futures, à travers la force du Pardon et du Temps. Pourquoi donc? Parce que les bases de l’indépendance du Togo ont été chaotiques et minées par des divisons ethniques que les années suivantes n’avaient qu’exacerbées, pour toutes sortes de raisons. Parce que, utopiques et peu disposés au compromis, les Togolais ont raté leur Conférence nationale souveraine. Parce que, très peu stratèges et toujours d’eternels amateurs politiques, les leaders d'opinion n’ont pas été à la hauteur des ambitions du peuple, de l’ensemble du peuple togolais, pour taire leur division et emprunter la voix du changement, au décès de Gnassingbé Eyadema, en tout cas, entre le 5 février 2005 et le 25 avril 2005. Parce que tout simplement lorsque l’on a échoué, on doit l’admettre et ne pas réclamer la couronne, le sceptre, le manteau et les souliers du vainqueur pour parcourir le monde et les Sites Internet.
Encore une fois, il va falloir le répéter et ne pas s’en lasser : les temps changent, la politique et les politiques évoluent aussi; le Togo ne peut plus attendre la contribution effective de tous ses enfants qui doivent se donner le plaisir et l’intelligence d’essayer autre chose que l’agressivité pathologique, la courte analyse, les envolées lyriques, la théorisation excessive de leur propre échec.
Je comprends la frustration momentanée des uns et des autres, la montée de fièvre solutionneuse chez certains, las d’attendre leur tour ou des explications convaincantes de leurs leaders politiques. Mais de grâce, la République togolaise des utopies nous l’avons déjà construite de force, de rapidité, d’illusion et de misère. Il nous reste celle du libre choix du compromis, de l’imagination et de l’avancée progressive. Elle nous appelle, où que nous soyons, pour une conspiration du compromis. En fait, elle appelle notre humilité et notre modestie à agir autrement avec une conviction nouvelle créatrice. Bonne année 2008!


Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 31/12/2007 à 14:28



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