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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




On remet le plaisir
On remet le plaisir
La table est vraiment mise… De retour, dans mes courriels, je retrouve le Communiqué diffusé par le bureau du Premier ministre du Canada. Généralement, j’en efface des dizaines du genre par mois, en voyant juste le titre. Voilà que celui-ci est de taille, et reprend in extenso, les propos du PM canadien. Voici sa position, plutôt, sa déclaration et sa charge, hier, au Parlement canadien; en attendant que les autres ne lui répondent par la bouche de leurs canons… Du plaisir renforcé !

[Le Premier ministre Stephen Harper a fait aujourd’hui la déclaration qui suit à la Chambre des communes concernant la motion proposée relative au Québec en tant que nation :
« Que cette Chambre reconnaisse que les Québécoises et les Québécois forment une nation au sein d'un Canada uni. »

Monsieur le Président,

La véritable intention du chef du Bloc et du camp souverainiste est parfaitement claire.
Ce n’est pas de faire reconnaître ce que les Québécois et Québécoises sont, mais ce que les souverainistes voudraient qu’ils soient.
Pour le Bloc, il n’est pas question du Québec en tant que nation, l’assemblée nationale s’est déjà prononcée là-dessus. Il est question de séparation.
Pour eux, nation veut dire séparation.
On a vu ses vraies intentions le 27 octobre quand il a dit: « …le NPD a reconnu pendant des décennies que le Québec forme une nation, mais à chaque référendum, ils agissent en contradiction avec les positions qu’ils ont prises. »
En d’autres mots, si on reconnaît les Québécois comme nation, il faut voter « oui » à un référendum sur la séparation.
Et la tentative du chef bloquiste d’entraîner des Québécoises et des Québécois de bonne foi à appuyer la séparation malgré eux rappelle les « pièges à homard » de son mentor Jacques Parizeau.
Mais les Québécois ne sont pas dupes de ces tactiques maladroites.
L’ancien Premier ministre péquiste, Bernard Landry, a posé la question suivante : « dès que cette reconnaissance sera réalisée, il faut que vous sachiez que vous serez par la suite confronté à la question suivante : Pourquoi la nation québécoise devrait-elle se satisfaire du statut de province d'une autre nation et renoncer à l'égalité avec votre nation et toutes les autres? »
La réponse est claire, parce que les Québécoises et les Québécois ont toujours joué un rôle historique pour faire avancer le Canada avec solidarité, courage et vision, et pour bâtir un Québec confiant, autonome, solidaire et fier, au sein d’un Canada fort, uni, indépendant et libre.
En débarquant à Québec, Champlain ne s’est pas mis à dire.
Ça ne marchera pas : c’est trop loin, il fait trop froid, c’est trop difficile.
Non, Champlain et ses compagnons ont travaillé fort parce qu’ils croyaient dans ce qu’ils faisaient, parce qu’ils voulaient préserver leurs valeurs, parce qu’ils voulaient construire un pays durable et sécuritaire.
Et c’est exactement ce qui s’est réalisé il y a presque 400 ans – La fondation de l’État canadien.
Monsieur le Président, les Québécois savent qui ils sont.
Ils savent qu’ils ont participé à la fondation du Canada, à son dévéloppement et à sa grandeur.
Ils savent qu’ils ont préservé leur langue et leur culture uniques et fait avancer leurs valeurs et leurs intérêts au sein du Canada.
La question est simple – est-ce que les Québécoises et les Québécois forment une nation, au sein d'un Canada uni? La réponse est oui.
Est-ce que les Québécoises et les Québécois forment une nation indépendante du Canada? La reponse est non, et elle sera toujours non.
Tout au long de leur histoire, ils ont toujours reconnu les prophètes de malheur et les véritables guides de leur destin.
Parce que les Québécois depuis Cartier et Laurier jusqu’à Mulroney et Trudeau ont dirigé ce pays et des millions comme eux ont contribué à le bâtir.
Et avec leurs concitoyens anglophones et francophones et des gens originaires de toutes les nationalités du monde, ils ont fait de ce pays ce qu’il est – le plus grand pays de la terre – un modèle brillant, dans un monde dangereux et divisé, de l’harmonie et de l’unité dont les peuples sont capables.
Et nous ferons ce que nous devons faire, ce que nos ancêtres ont toujours fait, soit préserver ce pays – un Canada fort, uni, indépendant et libre. ]



Entre délectation et cauchemar : la Nation ou la réflexion
Entre délectation et cauchemar : la Nation ou la réflexion
Et tout cela se passe sans qu’un coup de fusil ne soit tiré ou une mitraillette mise au service d’une quelconque cause. C’est ce qui fait le charme du débat canado-québécois, dont il faut être fou de s’en passer. Tellement, il présente des défis analytiques à geler les neurones, à qui n’y verrait qu’inutile conspiration de politiciens en mal de sensation.
Ainsi, pour Le PM canadien Stephen Harper, Le Québec serait bel et bien une Nation. C’est une évidence, qu’il faut simplement ouvrir les fenêtres ou circuler une seule fois dans une province ou territoire, autre que la dénommée Belle Province, pour s’en apercevoir. Naturellement, il faut du temps à certains pour s’en rendre compte, et surtout, oser l’affirmer. Lorsque l’on sort de la période de politique minimaliste de Jean Chrétien, auréolée par un retentissant Scandale des commandites qui balaya héritiers et adversaires de cette approche libérale de ne Rien dire, Rien voir, Rien écouter, l’anesthésie intellectuelle générale prend du temps à s’évaporer, afin que l’oxygénation du cerveau redevienne normale au Canada. Le réveil s’opère maintenant. La déclaration de Harper de reconnaître le Québec comme une Nation en est la preuve. Et l’évidence de la chose fait que très peu vont s’y opposer. Très peu, d’entre ceux qui s’y sont toujours opposés.

L’audace de Michael Ignatieff
En ce point, Michael Ignatieff a eu le génie de proposer à son parti politique, le Parti libéral du Canada, l’idée de cette reconnaissance. A la faveur de la course au leadership au PLC, l’ancien professeur de Harvard demeure assez bien inspiré dans cette position dont se réclame aujourd’hui le PM canadien. Ce dernier ne coupe pas l’herbe sous les pieds encore chancelants du prétendant à la direction du PLC, le même parti que les Trudeau, Chrétien et compagnie. Mais, pour avoir eu l’idée assez tôt et en faire un cheval de bataille, Ignatieff sanctifie l’audace qui, à mon avis, manque cruellement aux politiciens. Dans ce sens au moins, il pourrait se réclamer de Trudeau, même si le fils de ce grand politique -Justin Trudeau qui, nous dit-on, viendrait un jour en politique parce que simplement fils-de-son-père, Pierre Elliot Trudeau, sans en avoir la stature- s’est opposé dernièrement à l’inévitable reconnaissance du Québec comme Nation. Lui, le Justin Trudeau, avait raté une occasion de se taire, et continuer à faire ses classes, avant de nous sortir, autrement, ce qu’il a dans le corps…

L’embarras de Gilles Duceppe
Nation unique au Canada au point d’en être indépendante ? Pour les souverainistes, le Québec doit oser traverser la ligne. La reconnaissance actuellement proposée, fragilise un peu cette position de quête d’indépendance, dont le Bloc québécois et son chef, Gilles Duceppe, sont porteurs à Ottawa, et mandatés à cet effet par une partie importante des Québécois. Mais à l’analyse, la preuve d’un cheminement commun dans un Canada Uni doit encore être apportée par les fédéralistes, qui sont souvent restés sourds, muets et aveugles face aux besoins des provinces canadiennes, héritières d’une Constitution qui leur avait cédé des charges immenses de gouvernance, l’argent devant les accompagner en moins. Toutes ces Provinces et Territoires ne demandent pas pour autant, leur indépendance du Canada. La question demeure : Pourquoi donc le Québec ? La réponse est probablement aussi ailleurs. Et nous voilà de retour à la case de départ. Nous voilà reprojetés dans la réflexion permanente sur ce pays. Véritable mission de politicien!

C’est donc de la délectation papillante que nous réservent ces prochains jours, ces prochaines semaines, et au moins jusqu’aux élections québécoises et fédérales de 2007. C’est mon plaisir, et je ne peux m’en soustraire autrement qu’en le partageant. Maintenant que c’est fait, je peux passer à mes autres mille-et-une choses, tout aussi captivantes...



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