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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Silence au peuple togolais? Non! De partout, il nous faut donner des signes de la lente mais constante évolution politique du Togo, des signes de la conversion définitive de toute une nation à la démocratie et à une République intégrale. Le temps est propice; le rappel des troupes démocratiques doit être sonné, et chacun doit répondre à ce nouvel appel à la République. 2015 ne saurait être la reproduction du 2005 togolais avec ses centaines de morts. D’autant plus que les dix dernières années n’ont servi qu’à confirmer l’absence de volonté politique des pensionnaires du pouvoir présidentiel togolais : « Mais là parut l’écueil de sa course hardie, les peuples sommeillaient : un sanglant incendie fut l’aurore du grand réveil». « Démocratie ou rien! », « Démocratie ou rien! », ce peuple togolais têtu recommence à scander sa soif de liberté, rejoint par d’anciens fidèles du pouvoir oppresseur… Togolais, tous égaux par la démocratie.


Chuka Harrison Umunna, le nouvel Obama anglais. Il symbolise le devoir du changement en politique, même au Togo.
Chuka Harrison Umunna, le nouvel Obama anglais. Il symbolise le devoir du changement en politique, même au Togo.


Dans le brouillard des tergiversations et de la suffisance du pouvoir présidentiel, les Togolais ont réussi à s’emparer de la réconciliation et ont même obtenu l’unité d’action de l’opposition nouvelle post-Gilchrist Olympio. Réunir les deux solitudes togolaises, voir le Nord et le Sud aspirer ensemble à la démocratie reste un pas de géant consacrant la mue d’un certain Togo, inaltérable et incompressible devant tous les abus politiques des dernières années.

Évènement majeur également, la probante unité d’action politique de l’opposition togolaise est un manifeste véritable de la nécessité d’inaugurer une ère nouvelle dans la vie politique togolaise. Une ère de dépersonnalisation du débat qui vient consacrer l’aboutissement d’un plaidoyer; un plaidoyer aussi noble que la cause de l’appel à la démocratie et au devoir de produire, enfin, des résultats républicains dans l’action politique visant le changement au Togo. Toutes choses qui ne pouvaient exister sous le long règne et la domination inefficace de Gilchrist Olympio.

Ainsi, l’abîme politique avait tellement duré que l’acte politique lui-même était déconsidéré, orphelin de père et de mère, orphelin du pouvoir et de l’opposition. L’aveu d’une telle désespérance fut l’alliance contre nature entre Gilchrist Olympio et Faure Gnassingbé; une alliance contre-peuple, contre-écoute, contre-éthique, contre-vérité; une alliance contrefaite et un contre-exemple qui n’avait de raison que l’incompétence politique déchaînée de ses géniteurs ainsi que la tromperie programmée des citoyens togolais. Une alliance mort-née. Une alliance mortifère... À d’autres! Passons!

Les Togolais ne veulent rien savoir d’une démocratie frelatée

Les Togolais sont intégralement pacifiques, et ils possèdent une réelle adhésion à la République une et indivisible. C’est donc tout naturellement qu’ils veulent être démocrates, retrouver la démocratie ou rien. Rien d’un système politique frelaté, rien d’un kpayo démocratique qui enivre ses tenants et pervertit l’avenir du peuple; rien d’un état de siège permanent qui étouffe la fierté et l’enthousiasme de toute une nation; rien d’une force brute qui toujours s’abat sur leur désir de liberté, leur désir d’État de droit, leur désir d’humanité, de réconciliation, de raison et de bon sens.

Pour être restée si longtemps debout, l’aspiration du peuple togolais à la liberté est sans relâche et en renouvellement constant, en plus de mériter considération et encouragement. Très peu d’illusion subsiste aujourd’hui dans l’esprit des Togolais, et même jusque dans les rangs de ceux qui émargent au pouvoir présidentiel dominant. Démocrates dans l’âme, les obligés du pouvoir se sentent visiblement pris dans un engrenage antidémocratique dont ils n’ont pas le courage de s’extraire par leur force de caractère. Prisonniers, ils le sont de leur désir de gloire épineux et liberticide. Individuellement honnêtes, ils participent à une gouvernance antidémocratique et restent incapables de se résigner à la République intégrale qui ne demande qu’à les racheter, leur offrir la rédemption et le Grand Pardon, sauver leur âme.

C’est bien cette résistance fragrante à la démocratie qui complique les choses au Togo. Le Togo, un pays dont la traversée du désert a duré plus de quarante années, exceptionnellement, avant l’arrivée à la démocratie promise et toujours attendue. Cette longue traversée du désert a fini par rendre certaines personnes dépendantes et pensionnaires d’une démocrature, leur veau d’or, qui s’éternise en se confectionnant des habillages législatifs inédits à la veille de chaque élection cruciale.

C’est alors que des lois infidèles à la volonté populaire naissent pour corrompre et falsifier la République, retarder la réconciliation définitive. C’est alors que naissent des projets douteux de charité publique. Et pourtant l’histoire universelle l’a tant enseigné que : la justice l’emporte sur la charité. On ne peut pas faire le bien des peuples avec des moyens corrompus, la finalité ne justifie guère tous ces moyens douteux déployés à la grandeur du Togo. Des moyens douteux déployés dans toutes les circonstances et dont s’en répandent aujourd’hui d’anciens obligés. Heureusement, d’autres suivront. Heureusement, les peuples ont toujours une marge de liberté et d’oubli. Heureusement, il ne faudra pas soumettre tout le pays à un tardif rituel, un tout autre baptême de feu, pour l’expurger du cycle répétitif de tant d’erreurs et de fatalités. Heureusement, eux-aussi ne savaient pas ce qu’ils faisaient à leur peuple.

Des jours glorieux attendent le Togo

Probablement que s’achève une si longue comédie qui a répandu autant de débris dramatiques dans toutes les familles togolaises. Autant de « fantômes de gloire » ne peuvent plus hanter tout un pays, amoindrir et semer la honte sur tous ses citoyens. Au moment où le gouvernement togolais se durcit en se disant, par dérision grotesque, ouvert aux vertus du dialogue, de la limitation du mandat présidentiel et de l’alternance, c’est l’histoire d’une autre tragédie qui se prépare. Comprenons : Un seul Togolais mort pour qu’advienne enfin la démocratie civilisatrice au Togo, restera un mort de trop. Les dirigeants politiques togolais ne peuvent plus continuer à s’exonérer du « Tu ne tueras point » universel, d’autant plus que les exécutions, les disparitions et les répressions n’ont jamais dissuadé leurs compatriotes de faire renaître une démocratie véritable sur la « Terre de nos Aïeux ».

Démocrates ou rien, il est prévisible que les Togolaises et les Togolais continueront à se battre pour recouvrer leur dignité confisquée. Des lendemains de fanfaronnades et de liesses démocratiques, des veillées et des journées glorieuses sont donc à prévoir dans le proche avenir politique du Togo : des « Trois, Cinq, Sept Glorieuses » comme chaque peuple en a droit pour s’affranchir de la tyrannie et retrouver son destin. C’est écrit : « l’isolement n’est pas possible en temps d’élections, pas plus que la solitude au milieu d’un champ de bataille »; l’isolement des Togolais ne serait pas possible en temps de démocratie partout en Afrique et dans les voisinages immédiats du village global, à moins de vouloir la mort du Togo et de sa population exténuée et décidée.

Par ces temps, il faut donc ôter du Togo tout ce qu’il traîne encore de dangereux et de farfelu : faire croire et se leurrer que le Togo se fera sans la volonté librement exprimée de ses citoyens, ou imaginer sans cesse des astuces pour étouffer le suffrage universel, le véritable choix des Togolais, leur volonté suprême, c’est-à-dire l’ordre et la paix publique nécessaires au développement. Silence aux citoyens togolais? Non! La République intégrale sera au bout de l’alternance démocratique longtemps désirée des citoyens ou ce pays ne sera pas de son siècle et du concert des nations respectables. Et alors, les fossoyeurs du Togo en seront tenus responsables, à jamais devant l’Histoire. Il est grandement temps : Démocratie ou rien!



Horizon


Rédigé par Pierre S. Adjété le 27/06/2014 à 10:00



Il est indéniable que le silence, l’inaction, les ambiguïtés, les énigmes, les inconstances, les hésitations de Faure Gnassingbé ont fini par avoir raison de l’avènement d’un autre Togo, une autre République. Deux mandats présidentiels, dix années, à tourner en rond autour des indispensables réformes constitutionnelles et institutionnelles qui devaient faire évoluer le paysage politique vers une démocratie véritable dont le chef d’État togolais lui-même devrait en être le parrain et le bénéficiaire historique. Après une vingtaine de dialogues politiques, aucune volonté n’a malheureusement émergé du camp présidentiel, sinon la malice d’une perversion politique récurrente : la conservation du pouvoir ainsi que le refus de tout mode d’alternance pacifique, élégante et réparatrice du passé. En attendant la démocratie, agir pour une République intégrale au Togo devient un devoir citoyen de tous les instants : prendre parti pour un autre Togo.


Togo… En Attendant La Démocratie
La démocratie ne peut continuer à attendre, et dépendre seulement du bon vouloir d’un seul camp, celui-là même qui traine les pieds et n’y trouve que menace à sa suprématie. Au Togo, il sonne le glas de la démocratie et personne ne pourra arrêter une telle poussée. Au Togo, l’homme-successeur de son père au lourd passé s’est révélé, lui-même, un Chef d’État peu engagé dans la série de changements politiques fondamentaux dont son pays avait immanquablement besoin pour se réconcilier. Aujourd’hui, tout le monde constate que Faure Gnassingbé, pris au piège de ses propres tergiversations, n’a finalement pas la haute intention de s’ennoblir après ses deux mandats présidentiels se terminant en mars 2015, et ainsi ouvrir le pays à l’inévitable destin démocratique qui l’attend depuis plus de cinquante ans.

Durant les dix dernières années, il aurait été possible de réconcilier tous les Togolais et intégrer les Forces armées togolaises à l’œuvre de l’unité nationale. Telle fut d’ailleurs la promesse de Faure Gnassingbé lui-même, face au chaos socio-politique caractéristique de sa captation du pouvoir en février 2005. Ainsi devrions-nous tous, autant que nous sommes, être aujourd’hui en mesure de mélanger les couleurs, toutes les couleurs et les sensibilités du paysage politique togolais : jaune, bleu, blanc, rouge, orange, vert et autres, pour réserver nos énergies, pour livrer bataille seulement aux causes et symptômes du mal développement qui assaille notre pays. Malheureusement, cet espoir est resté amer, insuffisamment relevé sans aucune grandeur éthique mais plutôt à travers des actes politiques superficiels et malicieusement calculateurs. Une attitude dommageable qui pousserait même le camp présidentiel à vouloir légiférer sur les nombreux « désaccords » constatés dans le tout dernier dialogue politique.

Exiger davantage d’un chef d’État est un devoir citoyen
Et pourtant, le temps et les citoyens ne s’étaient jamais figés au Togo. Tout un pays aspire fortement à une alternance politique véritable et définitive; en permanence, tout un pays « soupire vers la liberté » à tout prix. Et chacun le sait, l’élite togolaise le sait davantage : le Togo actuel ne ressemble qu’imparfaitement à son incontournable destin démocratique. Arrive alors à point nommé, à poing levé même, cette observation de Desmond Tutu opportunément partagée sur Internet par un responsable politique togolais; une citation dont toutes les traductions révèlent bien la déliquescence et la chient-lit de l’ambiance politique qui prévaut au Togo et qui, conséquemment, appelle chaque citoyen à l’engagement : « Dans les situations d’injustice, rester neutre c’est choisir de prendre parti pour l’oppresseur ».

Rester silencieux et sourd-muet devient suspicieux autant que le sont les tentatives de vouloir faire croire qu’exiger davantage de Faure Gnassingbé serait l’exclure du jeu politique au risque de provoquer les dérapages semblables à ceux de la Conférence nationale souveraine togolaise de 1991. Une telle position, venant particulièrement d’un parti politique témoin privilégié des réalités togolaises, apparait d’ailleurs comme une grossière entourloupette : une tendance dont on peut croire qu’elle exprime une sorte de réticence démocratique malsaine, voire une résistance à la naissance d’un nouvel État-nation au Togo.

Le Togo de 2014 n’est nullement une copie conforme de celui des années quatre-vingt-dix. Le ratage d’une Conférence nationale ouverte sur l’indéfini et minée par les querelles larvées des prétendants politiques ne conditionne nullement l’avenir du Togo pour toujours. Les peuples sont dans des poussées démocratiques constantes et peuvent exiger davantage de leurs dirigeants du moment, davantage qu’ils ne doivent le faire de n’importe quel autre acteur politique. Ce recours vicieux à l’échec de la Conférence nationale togolaise se veut donc une injure à la mémoire de tous celles et ceux qui ont laissé leur vie, leur honneur ainsi que leurs biens dans les tourments et les retournements de cet évènement. La Conférence nationale togolaise reste un avatar politique imputable à ceux qui avaient participé à l’évènement historique, de près ou de loin, autant qu’à ceux qui avaient tout fait pour qu’advienne le revers de ces rencontres et particulièrement le travestissement des maigres résultats qui en sont issus.

Sortir de l’indifférence et changer définitivement le destin du Togo
Désormais, il faut parler, agir, interpeller toutes les consciences pour un engagement au dépassement. Désormais, il est clair que l’absence de démocratie devient périlleuse pour chaque citoyen togolais; périlleuse pour la réconciliation, la tranquillité et la prospérité du pays; périlleuse pour les intérêts de tous les pays amis et alliés du Togo. Désormais, il faut assumer une rupture avec ce passé démocratique timoré d’un Togo amoindrit par trop de perversions politiques. Car, il y a au fond de ce Togo qui se perpétue sous nos yeux, une réalité douloureuse d’un manque de volonté politique, d’un excès de pouvoir, même d’un excès de victoire d’un seul camp et par tous les moyens, d’un excès d’indifférence, d’un état de siège en somme.

En d’autres termes, souvenons-nous des plus récents traumatismes togolais : une année 2005 douloureuse que personne ne veut voir se répéter en 2015. Que tant de citoyens aient sacrifié leur vie pour rien. Que tant d’années aient été utilisées pour si peu. Que tant de dialogues n’aient servi qu’à légitimer une république insuffisante. Et ce n’est pas fini. Après l’effusion de tant de sang, après autant d’attentes et de concessions, après tant d’errance pour une si simple destination, après tant d’opinions, tant d’oppositions, tant de constitutions, tant de toilettages, tant d’incendies, d’arrestations et d’arbitraires, c’est toujours le statuquo politique qui prédomine au Togo, au moment même où le peuple a énormément soif d’une République intégrale, confortable et rassurante pour chaque citoyen, soif d’une réconciliation, soif d’un Grand Pardon, soif d’un État de droit, soif de justice, soif de paix, soif des élections crédibles, soif de dignité, soif du développement, soif de démocratie.

En attendant cette incontournable démocratie, cette République intégrale, il s’agit de prendre parti pour le Togo. D’ailleurs, Faure Gnassingbé lui-même a très peu de choix : la perpétuation de la violence par la répression policière et militaire ou l’interruption du fourvoiement politique caractéristique des atermoiements de ses deux mandats présidentiels au profit de la refondation véritable du Togo, ici et maintenant. Sur tout le Togo sonne un glas. Inutile de demander pour qui ni pour quoi résonnent ces cloches de lassitude, de désobéissance éthique, de désarroi et d’appel à un autre Togo. Il y a lieu d’agir, et agir autrement et promptement pour réinventer un autre pays, assumer le Togo autrement en y faisant entrer définitivement la démocratie. Et lorsque la démocratie entrera au Togo, lorsqu’elle retournera au Togo, c’est véritablement un tout autre pays qui s’éveillera avec l’ensemble de ses citoyens. Faisons notre devoir… Sauvons le Togo, collectivement… Donnons un nouveau destin définitivement pacifié à notre pays.



Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 17/06/2014 à 03:23



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