Profil
Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Illusions d'homme
Illusions d'homme
Que fait-on lorsqu’on est inquiet pour un ami ? Un ami avec qui on a l’habitude de faire et de refaire le monde. Un ami qui se retrouve face à une situation difficile dans laquelle il s’est retrouvé, un peu malgré lui et un peu aussi à cause de lui. Car tout simplement, on est jamais totalement étranger à son propre destin.

Que fait-on lorsqu’on découvre que les solutions envisagées dans un combat avec un ami et à côté de lui ne mènent finalement nulle part ? Non pas que les solutions manquent d’imagination et d’audace, mais simplement parce que l’autre partie ne veut rien savoir. Elle a probablement les moyens de ne rien savoir, parce qu’elle avait reconnu ses erreurs passées et a proposé une solution, partielle et partiale. Elle avait proposé une solution, surtout à la mesure de sa force ou de sa grande puissance.

Que fait-on lorsqu’on fait face à cette arrogance devenue institutionnelle ? Probablement que l’on abdique pas, au nom de ses principes… C’est ce que nous avons fait pour demander juste réparation, le ‘Juste prix’ du dédommagement disaient les révolutionnaires marxistes. Un juste prix qui tarde à venir ; un juste prix qui peut ne jamais venir.

Que fait-on face à un ami qui se meurt sous ton regard ? Dans ce cas-ci, il n’a pas reçu une rafale d’une arme de guerre. Il a en lui le noble virus de la justice et des principes. Mais il se meurt tout de même, perdant certains signes vitaux dont l’incapacité de discuter sereinement, la perte de sommeil, la désolidarité de son épouse dans la poursuite de cette cause et, que sais-encore…

Que fait-on enfin lorsque cet ami tente de te fuir ? Te fuir parce qu’il comprend que tu lui proposes autre chose : redéfinir la lutte -sa lutte avant tout, revoir ses propres objectifs de lutte, faire œuvre utile pour que de tels abus ne se répètent pas sur d’autres, et surtout, le préserver et lui redonner vie.

Que fait-on quand on est tout simplement humain face aux difficultés de l'autre, le grand ami ? Probablement, quelque chose de simple, de très simple: parler, lui parler encore, lui reparler, …



Silence


Rédigé par psa le 03/11/2006 à 10:21



À nos morts, et ils ne sont pas que de guerre
Nos morts


Ils gisent dans le champ terrible et solitaire.

Leur sang fait une mare affreuse sur la terre ;

Les vautours monstrueux fouillent leur ventre ouvert ;

Leurs corps farouches, froids, épars sur le pré vert,

Effroyables, tordus, noirs, ont toutes les formes

Que le tonnerre donne aux foudroyés énormes;

Leur crâne est à la pierre aveugle ressemblant ;

La neige les modèle avec son linceul blanc ;

On dirait que leur main lugubre, âpre et crispée,

Tâche encor de chasser quelqu'un à coups d'épée ;

Ils n'ont pas de parole, ils n'ont pas de regard ;

Sur l'immobilité de leur sommeil hagard

Les nuits passent ; ils ont plus de chocs et de plaies

Que les suppliciés promenés sur des claies ;

Sous eux rampent le ver, la larve et la fourmi ;

Ils s'enfoncent déjà dans la terre à demi

Comme dans l'eau profonde un navire qui sombre ;

Leurs pâles os, couverts de pourriture et d'ombre,

Sont comme ceux auxquels Ézéchiel parlait ;

On voit partout sur eux l'affreux coup du boulet,

La balafre du sabre et le trou de la lance ;

Le vaste vent glacé souffle sur ce silence ;

Ils sont nus et sanglants sous le ciel pluvieux.

Ô morts pour mon pays, je suis votre envieux.



Victor Hugo





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